Focus sur : la Dolomède des roseaux

L’équipe du Mas Mireille, dans la Vallée des Baux, a récemment trouvé un individu de l’espèce Dolomède des roseaux. Cette espèce d’araignée semi-aquatique est rare et menacée en France.

D’où lui vient son joli nom ? 

Le nom scientifique Dolomedes plantarius a été attribué par l’arachnologue suédois Carl Alexander Clerck en 1757. Le terme « Dolomedes » provient du grec ancien dolos, signifiant « ruse » ou « tromperie », en référence à ses techniques de chasse furtives. Quant au terme « plantarius », il peut faire allusion à son habitat privilégié parmi les plantes des zones humides.

En Europe, deux espèces de Dolomedes sont présentes : Dolomedes plantarius et Dolomedes fimbriatus. Les deux espèces sont très similaires et ont besoin d’un examen détaillé pour pouvoir être différenciées.

Comment la reconnaître ? 

Il s’agit d’une araignée au corps brun chocolat, marqué de bandes latérales crèmes ou blanches. Ses pattes sont longues et fines, adaptées au déplacement sur l’eau. Les femelles peuvent atteindre jusqu’à 20 mm de longueur corporelle, avec une envergure totale (pattes étendues) pouvant approcher les 7 cm.

Comment cette espèce vit-elle ? 

La Dolomède des roseaux est une araignée semi-aquatique qui chasse en détectant les vibrations sur la surface de l’eau. Elle se tient souvent immobile, les pattes arrière ancrées sur la végétation et les pattes avant posées sur l’eau, prête à capturer des proies telles que des invertébrés aquatiques, des coléoptères aquatiques ou des odonates (libellules). En cas de danger, elle peut plonger et rester immergée en retenant de l’air grâce à ses poils hydrophobes.

Pendant la parade nuptiale, le mâle tapote la surface de l’eau avec ses deux paires de pattes avant et s’approche lentement de la femelle. En générant des vibrations à des fréquences non utilisées par leurs proies, les mâles sont ainsi capables de se faire identifier comme des prétendants potentiels plutôt que comme une proie. La femelle porte ses œufs dans un cocon qu’elle garde avec elle jusqu’à l’éclosion, puis elle construit une « pouponnière » où les jeunes araignées restent quelques jours sous sa surveillance.

Comment l’équipe scientifique du Mas Mireille l’a-t-elle trouvée ? 

Dans le cadre de l’inventaire des araignées que notre équipe du Mas Mireille mène actuellement dans la Réserve Naturelle Régionale de l’Ilon, nous savions que le marais de l’Ilon pouvait abriter potentiellement la Dolomède des roseaux. Cependant elle n’avait pas été détectée lors de prospections récentes dans des marais proches à l’est du Rhône. Nous nous attendions aussi à croiser Dolomedes fimbriatus, plus commune. Mais à notre grande surprise, la première Dolomède observée s’est révélée être bel et bien la Dolomède des roseaux ! Une belle découverte, qui souligne l’importance de ces milieux naturels et de leur préservation.

Vous avez dit “espèce menacée” ? 

La Dolomède des roseaux est classée « en danger d’extinction » en France (et “en danger critique” dans la région Nord-Pas-de-Calais), notamment en raison de la destruction et de la fragmentation de ses habitats naturels, tels que les marais et les tourbières. Le drainage des zones humides, l’urbanisation et le changement climatique contribuent à la diminution de ses populations. De plus, sa faible capacité de dispersion la rend particulièrement vulnérable aux perturbations environnementales.

(Crédit photos : Romain Barthel)

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